LE CONSEIL,
VU les articles 2 a), 2 b) et 5 b) de la Convention relative à l'Organisation de coopération et de développement économiques, en date du 14 décembre 1960 ;
VU la Recommandation du Conseil concernant une politique globale de gestion des déchets, en date du 28 septembre 1976 [C(76)155(Final)] ;
VU le point 5 de la Déclaration sur les politiques d'environnement à caractère anticipatif, en date du 8 mai 1979, adoptée par les gouvernements des pays Membres de l'OCDE et de la Yougoslavie, selon lequel, en proposant des lois et en établissant des règlements, ils chercheront à éviter des dispositions d'une complexité excessive ou contradictoires et des retards inutiles dans les décisions affectant l'environnement ;
VU la partie 1 de la Déclaration intitulée « L'environnement : Ressource pour l'avenir », en date du 20 juin 1985, adoptée par les gouvernements des pays Membres de l'OCDE et la Yougoslavie, selon laquelle ils favoriseront l'intégration effective de ces politiques, notamment en définissant des objectifs complémentaires, en améliorant la coordination entre les autorités compétentes et en améliorant les aides à la prise de décision ;
VU les conclusions de la troisième réunion à haut niveau du Groupe des produits chimiques du 18 mars 1987 relatives à la gestion globale des risques ;
VU la Déclaration ministérielle de Bergen sur le développement durable dans la région de la Commission Économique des Nations Unies pour l'Europe adoptée le 16 mai 1990, en particulier les points IV, 15 a), b) etc) ;
CONSIDÉRANT que les substances peuvent se déplacer d'un milieu à un autre (air, eau, sol, êtres vivants) au cours de leur cheminement d'une source vers un récepteur et qu'elles peuvent s'accumuler dans l'environnement ;
CONSIDÉRANT que le contrôle des rejets d'une substance dans un seul milieu de l'environnement peut avoir pour conséquence de transférer la substance dans un autre milieu de l'environnement ;
CONSIDÉRANT que dans de nombreux pays Membres, les efforts de lutte contre la pollution portent sur chaque milieu de l'environnement pris séparément, et que le contrôle de la commercialisation et de l'utilisation des substances est effectué séparément ;
CONVENANT que ces efforts entrepris isolément ne constituent pas nécessairement le moyen le plus efficace ni le plus efficient pour protéger l'environnement ;
Sur la proposition du Comité de l'environnement ;
I. RECOMMANDE :
1. que les pays Membres pratiquent la prévention et le contrôle intégrés de la pollution en tenant compte des effets des activités et des substances sur l'environnement global et de la totalité du cycle de vie commerciale et environnementale des substances dans l'évaluation des risques qu'elles présentent et dans l'élaboration et la mise en oeuvre de mesures destinées à limiter leurs rejets ;
2. que les pays Membres s'assurent que leurs lois et réglementations favorisent la prévention et le contrôle intégrés de la pollution :
i) en évaluant dans quelle mesure celles-ci présentent des obstacles à l'adoption d'une approche intégrée ;
ii) en modifiant, le cas échéant, les lois et réglementations existantes pour supprimer ces obstacles ; et
iii) en adoptant, si nécessaire, de nouvelles lois et réglementations visant à promouvoir la prévention et le contrôle intégrés de la pollution.
3. que les pays Membres adoptent des procédures administratives et des dispositions institutionnelles de façon à assurer la mise en oeuvre efficace d'une approche intégrée de la prévention et du contrôle de la pollution.
II. RECOMMANDE que, dans l'évolution vers une approche plus intégrée, les pays Membres tiennent compte des orientations pour la prévention et le contrôle intégrés de la pollution, définies dans l'Appendice qui fait partie intégrante de la présente Recommandation.
III. CHARGE le Comité de l'environnement d'examiner les actions entreprises par les pays Membres en application de la présente Recommandation dans un délai de trois ans après l'adoption de la présente Recommandation.
ANNEXE
ORIENTATIONS POUR LA PRÉVENTION ET LE CONTRÔLE INTEGRÉS DE LA POLLUTION
Principes fondamentaux de la prévention et du contrôle intégrés de la pollution
1. La prévention et le contrôle intégrés de la pollution ont pour objet de prévenir ou de réduire au minimum le risque d'atteinte à l'environnement pris dans son ensemble. Cette approche reconnaît la nature intégrée des questions d'environnement en tenant compte des effets des substances ou activités sur tous les milieux (air, eau, sol), sur les organismes (y compris l'être humain) vivant dans ces milieux et sur le patrimoine culturel et esthétique. Parmi les aspects importants de l'approche intégrée, on trouve :
a) la prise en compte de la totalité du cycle de vie des substances et des produits (depuis leur fabrication jusqu'à leur élimination finale) ;
b) la prévision des effets des substances et des activités (à la fois nouvelles et existantes) dans tous les milieux de l'environnement, notamment la prise en compte des multiples voies d'exposition et du transfert des substances dans l'environnement ;
c) la réduction au minimum de la quantité de déchets et de leur nocivité ;
d) l'utilisation d'un moyen commun tel que l'évaluation des risques pour procéder à une estimation et à une comparaison des problèmes d'environnement ; et
e) l'utilisation complémentaire de mesures axées sur les effets, telles que les objectifs de qualité de l'environnement, et d'autres axées sur les sources, telles que les limites d'émissions.
Aspects essentiels de l'action des pouvoirs publics
2. Certaines actions, communes à tous les aspects de la protection de l'environnement, sont essentielles à l'adoption effective d'une approche intégrée. Il convient notamment de :
a) prendre en compte la notion de développement durable, y compris les économies d'énergie et l'utilisation rationnelle des ressources renouvelables ;
b) promouvoir la mise au point et l'application de technologies produisant peu de déchets ou n'en produisant pas, ainsi que de stratégies de recyclage ;
c) appliquer des technologies plus propres et de remplacer les substances nuisibles par des produits plus sûrs ;
d) ne pas exclure, en l'absence d'informations complètes, la mise en oeuvre de mesures préventives destinées à atténuer le risque d'atteintes notables à l'environnement ;
e) informer et consulter le public lors de l'évaluation des effets des substances et des activités sur la santé et l'environnement ;
f) intégrer les considérations d'environnement dans les prises de décisions publiques et privées ; et
g) adopter des politiques qui visent explicitement à assurer l'application et le respect des mesures et qui soient cohérentes et efficaces du point de vue des différents milieux.
Éléments essentiels pour la prise de décision
3. L'adoption d'une approche intégrée de la prévention et du contrôle de la pollution entraînera une modification des éléments sur lesquels l'accent était traditionnellement mis lors de la prise de décision. L'approche intégrée se fonde essentiellement sur les nouveaux éléments suivants :
a) la substance ;
b) la source (il peut s'agir de procédés industriels, de produits et de secteurs économiques) ; et
c) la zone géographique.
Ces nouveaux éléments ne sont pas mutuellement exclusifs et peuvent être combinés les uns avec les autres et associés à des systèmes existants tels que ceux qui s'inspirent d'une stratégie visant un seul milieu.
Législation
4. Bien que les formes législatives puissent varier largement, une approche favorisant l'intégration de la prévention et du contrôle de la pollution devrait constituer la caractéristique commune de toutes les lois touchant à l'environnement. Il convient de prendre en compte non seulement la législation portant spécifiquement sur l'environnement, mais également celle intéressant d'autres domaines tels que l'énergie, les transports, l'agriculture, la sylviculture, l'exploitation du sous-sol, l'aide au développement et la fiscalité.
Mesures institutionnelles
5. Les mesures institutionnelles et les procédures administratives nécessaires à la mise en oeuvre d'une approche intégrée comprennent :
a) des modifications dans les structures organisationnelles et dans les procédures internes de fonctionnement et de prise de décision ;
b) l'établissement de mécanismes de coordination à l'intérieur des organismes publics et entre ceux-ci ; et
c) des dispositifs en vue d'une coopération au niveau international et entre les différents niveaux d'administration dans les pays.
Instruments de gestion
6. La prévention et le contrôle intégrés de la pollution font intervenir divers instruments de gestion. En choisissant parmi ces instruments, une attention toute particulière doit être portée :
a) à la délivrance de permis uniques, englobant tous les rejets et procédés ;
b) à la liaison entre les instruments de protection de l'environnement et les mécanismes d'aménagement du territoire et de gestion des ressources naturelles, ainsi que la réglementation de services tels que les transports et autres moyens de communication ;
c) à la réalisation d'études d'impact sur l'environnement relatives aux propositions et projets d'actions ;
d) à la planification de l'action des pouvoirs publics en vue de mettre au point des stratégies conduisant à une amélioration globale de la qualité de l'environnement ;
e) à l'intégration au niveau des autorités chargées de l'inspection et de l'application des mesures ;
f) à l'utilisation d'instruments économiques ;
g) à l'encouragement et/ou au subventionnement de la mise au point de technologies plus propres ; et
h) à la prise en compte des problèmes liés à l'ensemble du cycle de vie lors de l'élaboration de plans de gestion industrielle.
Les méthodes techniques
7. Les méthodes techniques utilisées pour étayer la prévention et le contrôle intégrés de la pollution devraient elles-mêmes présenter un caractère intégré. Ces méthodes techniques comprennent :
a) une analyse de chaque stade du cycle de vie commerciale d'une substance ou d'un produit (depuis sa conception et sa fabrication jusqu'à son élimination) et du cycle de vie dans l'environnement (y compris la transformation et le transfert des substances chimiques dans les différents milieux de l'environnement) ;
b) une analyse des multiples voies d'exposition ;
c) l'utilisation d'inventaires des rejets d'une installation dans tous les milieux, associés à des inventaires des entrées de matières, afin de permettre l'établissement de bilans-matières ; et
d) la surveillance de l'état des milieux de l'environnement et des organismes qui y vivent, ainsi que de l'état du patrimoine culturel et esthétique, afin de déterminer les niveaux de dégradation ou les tendances.