LE CONSEIL,
VU l’article 5 b) de la Convention relative à l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques en date du 14 décembre 1960 ;
VU la Recommandation du Conseil relative aux lignes directrices sur la sûreté sismique des établissements scolaires [C(2005)24], la Recommandation du Conseil sur les bonnes pratiques pour améliorer la sensibilisation aux risques et l'éducation sur les questions d'assurance [C(2008)22], la Recommandation du Conseil sur la protection des infrastructures d'information critiques [C(2008)35], et la Recommandation du Conseil sur la gestion du risque de sécurité numérique pour la prospérité économique et sociale [C(2015)115] ;
CONSIDÉRANT les divers instruments juridiques fournissant des lignes directrices internationales sur la gestion des risques de catastrophe élaborés depuis l’adoption de la Recommandation du Conseil sur les bonnes pratiques pour réduire et financer les risques catastrophiques [C(2010)143/REV1], que la présente Recommandation remplace, et, en particulier, l’adoption de la Recommandation du Conseil sur la gouvernance des risques majeurs [C/MIN(2014)8/FINAL], qui donne des orientations complémentaires sur la gestion des risques majeurs, notamment les risques de catastrophe ;
RECONNAISSANT l’ampleur des conséquences sociales, économiques et financières des catastrophes, qu’elles soient naturelles ou provoquées par l’homme, et l’accroissement possible de la fréquence et de l’intensité des phénomènes extrêmes sous l’effet du changement climatique, qui, conjugués à l’augmentation de la valeur des actifs situés dans des lieux exposés aux aléas, peuvent avoir des conséquences plus lourdes à l’avenir ;
RECONNAISSANT qu’il convient d’évaluer correctement et de gérer financièrement les coûts induits par les catastrophes d’origine naturelle ou anthropique, et qu’il faut pour cela que les pouvoirs publics élaborent par anticipation, puis actualisent régulièrement, une stratégie intégrée de financement des risques de catastrophe afin d’atténuer les conséquences financières, économiques et sociales des catastrophes, qui tienne compte de la disparité de la répartition des responsabilités entre les différents niveaux d’administration dans les différents pays, et d’objectifs complémentaires de politique générale, comme la solidarité entre pays/régions ;
RECONNAISSANT qu’une stratégie de financement des risques de catastrophe est l’un des éléments essentiels d’une approche complète de la gestion des risques de catastrophe et du développement durable et devrait être ancrée dans un cadre intégré d’identification des aléas, d’évaluation des risques et de la vulnérabilité face à ces risques, de sensibilisation et d’éducation aux risques, de gestion des risques, de réaction face aux catastrophes et de remise en état résiliente ;
RECONNAISSANT que, même si les instruments de transfert de risques, comme les instruments d’assurance/de réassurance et les instruments financiers, peuvent jouer un rôle fondamental dans la réduction des conséquences économiques des catastrophes, le seul moyen durable d’atténuer les conséquences des catastrophes dans le temps réside dans l’investissement dans la réduction des risques et le renforcement de la résilience aux risques de catastrophe ;
NOTANT que l’OCDE joue un rôle de premier plan dans l’accompagnement des Membres et des Partenaires dans la gestion des conséquences financières des catastrophes et que ces travaux ont été salués par des instances internationales, notamment dans le Communiqué des ministres des Finances et gouverneurs de banques centrales des pays du G20 réunis à Mexico (2012) et la Déclaration commune des ministres des Finances de la Coopération économique Asie-Pacifique (2013) ;
NOTANT qu’une gestion financière efficace des risques de catastrophe est essentielle pour atteindre les objectifs du Cadre d'action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015) ainsi que les objectifs relatifs aux pertes et préjudices figurant dans l’Accord de Paris sur le climat (2015).
Sur proposition du Comité des assurances et des pensions privées :
I. CONVIENT qu’aux fins de la présente Recommandation les définitions ci-après s’appliquent :
· « Évaluation du risque » : méthode permettant de déterminer la nature et l’étendue du risque à la fois en analysant les aléas, leur probabilité de survenue et leur intensité potentielle, et d’en estimer les conséquences en évaluant les éléments de vulnérabilité et en recensant les personnes, biens, infrastructures, services exposés, leurs sources de revenus et leur environnement ;
· « Exposition » : mesure de la valeur maximale potentielle des pertes et dommages ;
· « Protection financière » : dans le contexte des risques de catastrophe, niveau d’indemnisation que l’on peut attendre à la suite de la survenue d’une catastrophe et/ou de coûts spécifiques encourus en raison d’une catastrophe (ex. : contrat d’assurance dommage, contrat d’assurance paramétrique, obligation catastrophe, indemnisation ou aide financière des pouvoirs publics pour les pertes dus aux catastrophes) ;
· « (Ré)assurance publique » : assurance ou réassurance fournie par le secteur public ;
· « Rétention de risques » : approche de la gestion des risques consistant à conserver la responsabilité du risque et des coûts associés à la matérialisation de ce risque ;
· « Risques de catastrophe » : les risques de catastrophe, qui sont fonction des aléas, de l’exposition, de la vulnérabilité et des capacités, sont liés à la possibilité que surviennent des phénomènes soudains ou à évolution lente aux conséquences dommageables, d’origine naturelle ou anthropique (ex. séismes, inondations, cyberincidents de grande ampleur, attentats terroristes), dont certains devraient être considérés comme des risques majeurs ;
· « Transfert de risques » (instrument de) : approche de la gestion des risques impliquant le transfert de la responsabilité financière de tout ou partie du risque et des coûts liés à la matérialisation de ce risque (ex. : par l’intermédiaire d’un instrument financier comme un contrat d’assurance dommages) ;
· « Vulnérabilité financière » : vulnérabilité résultant d’un décalage entre l’exposition aux pertes et dommages et la capacité financière à les absorber.
II. RECOMMANDE aux Membres et non Membres ayant adhéré à la Recommandation (ci-après les « Adhérents ») d’établir, sous l’égide du ministre des Finances ou d’une autre autorité nationale compétente, en tenant dûment compte du fait que la responsabilité nationale à l’égard des risques de catastrophe s’exerce à des niveaux différents selon les pays, une stratégie de gestion des conséquences financières des catastrophes de nature à :
i) Favoriser, par la mise en œuvre des éléments de cette Recommandation, une approche intégrée de la gestion financière des risques de catastrophe à tous les niveaux de l’administration, reposant sur des bases solides en matière de gestion des risques, qui comprenne une évaluation complète des multiples aléas, destinée à maximiser le rapport coût-efficacité global de l’investissement public et privé.
ii) Fournir des ressources suffisantes pour mobiliser les capacités institutionnelles et les compétences spécialisées nécessaires à l’évaluation des risques de catastrophe et des coûts et avantages relatifs des différentes approches de la gestion de ces risques.
iii) Assurer la coopération et la coordination des organisations du secteur public et privé, y compris des différents niveaux d’administration, ayant des responsabilités et des compétences spécialisées en matière de gestion des conséquences financières des risques de catastrophe, et, le cas échéant, tirer profit des possibilités de coopération et de partage de l’information au niveau international, compte tenu du caractère potentiellement transfrontière des facteurs déterminant les risques de catastrophe et des impacts de ces derniers.
iv) Estimer le niveau de rétention et de transfert de risques adapté, en prenant en considération les attributions et les responsabilités respectives du secteur public et du secteur privé, y compris des différents niveaux d’administration, en matière de conséquences financières des risques de catastrophe, et leur capacité à gérer ces conséquences financières ; et déceler d’éventuelles vulnérabilités financières résultant de l’exposition aux risques de catastrophe.
III. RECOMMANDE aux Adhérents de promouvoir des processus complets d’évaluation des risques qui permettent d’estimer l’exposition aux vulnérabilités financières et de les identifier, en s’attachant à :
i) Encourager la mise au point de technologies et le renforcement de compétences spécialisées dans le domaine du suivi et de l’évaluation des risques de catastrophe par les pouvoirs publics, le secteur privé et des organisations non gouvernementales, notamment les communautés scientifique et universitaire et, si cela est utile, en tirant parti des capacités et des compétences spécialisées du secteur privé pour élaborer des modèles d’évaluation des risques et de l’exposition aux risques.
ii) Faire en sorte que des données sur les biens, les vulnérabilités structurelles, les aléas et les pertes antérieures, nécessaires à l’évaluation chiffrée de l’exposition potentielle soient produites, recueillies, partagées et rendues publiques, sous réserve des obligations applicables en matière de confidentialité et de respect de la vie privée. Des efforts devraient être déployés afin d’harmoniser les processus de recueil et de déclaration des données au niveau national, régional, et international. Il conviendrait d’évaluer les pertes consécutives aux catastrophes importantes, sur la base d’une méthodologie cohérente, en coordination avec le secteur privé, afin d’améliorer la disponibilité des données nécessaires à l’évaluation de l’exposition aux risques de catastrophe pour l’avenir.
iii) Prendre en compte les impacts directs et indirects, en évaluant à la fois les scénarios normaux et extrêmes, en anticipant toute évolution importante de la nature du risque (résultant par exemple du changement climatique), et en tenant compte du niveau d’incertitude inhérent à ce type d’estimations, mais également des liens d’interdépendance sectorielle, régionale et internationale.
IV. RECOMMANDE aux Adhérents de favoriser la gestion efficace des conséquences financières des catastrophes par tous les segments de la population et de l’économie et d’encourager le développement de marchés du transfert de risques pour les risques de catastrophe, en s’efforçant de :
i) Soutenir les initiatives visant à sensibiliser les particuliers, les entreprises et, le cas échéant, les autorités infranationales, aux risques de catastrophe, à leur responsabilité dans la gestion de ces risques, et aux limites de la protection financière fournie par les institutions financières et les entités publiques. L’information sur les risques de catastrophe et sur les limites de la protection financière devrait tenir compte des biais comportementaux des individus et des groupes, comme la tendance à sous-estimer les risques, mais aussi de leurs compétences financières et de leur degré d’inclusion financière.
ii) Mettre en place un cadre de réglementation et de surveillance du secteur financier qui :
a) assure la solidité, l’ouverture et l’efficience du secteur financier, et lui permette de disposer de capacités financières suffisantes pour prendre en charge les risques de catastrophes, notamment en facilitant le transfert de risques vers les marchés de l’assurance/la réassurance et les marchés financiers nationaux et internationaux ;
b) permette de définir une tarification et des clauses contractuelles (primes, franchises, périmètre de la couverture, co-assurance, excédent de sinistres) facilitant le transfert de risques tout en encourageant la réduction des risques ;
c) impose que les clauses contractuelles relatives à l’étendue de la protection financière et aux éventuelles exclusions et restrictions soient compréhensibles par des non-spécialistes ;
d) garantisse que les plans, processus, et capacités opérationnelles nécessaires sont en place, afin de permettre une indemnisation rapide et équitable des préjudices résultant des dommages et pertes causés par les catastrophes et couverts par l’assurance, notamment, le cas échéant, les délais impartis pour verser des avances au titre des indemnités dues.
iii) Évaluer les mesures permettant de résoudre les problèmes éventuels liés à la disponibilité et/ou l’accessibilité économique des instruments de transfert de risques pour tout ou partie des risques de catastrophe, comme :
a) des normes efficaces relatives à l’utilisation des sols et à la construction, et la réalisation d’investissements ciblés dans la prévention ;
b) des prescriptions réglementaires liées à l’achat ou à l’offre d’instruments de transfert de risques ;
c) des incitations financières en faveur de l’investissement privé dans la réduction des risques ; et
d) des dispositifs publics d’assurance/de réassurance et de garantie, favorisant une large mise à disposition et accessibilité économique des instruments de transfert de risques.
iv) Si nécessaire, mettre au point des dispositifs publics d’indemnisation et d’aide financière, en coordination avec les différents niveaux d’administration, afin d’apporter pour les dommages non assurables, une aide rapide, ciblée, transparente et équitable, aux segments vulnérables de la population et/ou de l’économie, et des mécanismes de transferts financiers venant en appui aux administrations infranationales confrontées à des contraintes budgétaires, dans l’objectif de limiter le plus possible les perturbations économiques, et de favoriser la stabilité du financement de l’économie.
v) Faire en sorte que l’assurance contre les catastrophes et les dispositifs d’indemnisation incitent à une réduction des risques dans les secteurs public et privé, et tiennent compte des avantages que recèle l’utilisation des capacités des marchés d’assurance/de réassurance et des marchés financiers nationaux et internationaux pour absorber les pertes causées par les catastrophes.
V. RECOMMANDE aux Adhérents de gérer efficacement les conséquences financières des catastrophes sur les finances publiques en s’employant à :
i) Évaluer l’exposition financière potentielle des États aux risques de catastrophe, en tenant compte, le cas échéant, des éléments ci-après :
a) le coût estimé des opérations de secours et réparation et de la reconstruction des infrastructures publiques ;
b) l’exposition aux pertes résultant de dispositifs publics d’assurance/de réassurance ou de garantie ;
c) le montant estimé des versements au titre des dispositifs publics d’indemnisation ou d’aide financière en faveur des segments de la société ou de l’économie vulnérables aux risques de catastrophe et/ou des administrations infranationales confrontées à des contraintes budgétaires, y compris dans l’éventualité où une aide financière non prévue est nécessaire ; et
d) les conséquences potentielles d’une dégradation des conditions macroéconomiques, comme une baisse de l’activité économique, des recettes publiques ou une dégradation de la balance des paiements.
ii) Élaborer un ou des plans ex ante de gestion des conséquences financières des catastrophes sur les finances publiques, en examinant la contribution potentielle des réaffectations budgétaires, des taxes appliquées à titre temporaire, du financement par l’emprunt, des réserves, des assurances et des instruments financiers, et en prenant en compte la capacité financière, le niveau souhaité de rétention ou de transfert de risques, ainsi que le coût, l’échelonnement et la disponibilité des diverses formules de financement possibles.
iii) Assurer, lorsque cela est autorisé, la diffusion publique de tout ou partie de ce plan ou de ces plans afin de renforcer la confiance dans la capacité des pouvoirs publics à gérer les conséquences financières des catastrophes.
iv) Analyser les avantages relatifs de la rétention ou du transfert de risques et des investissements ex ante dans la prévention des risques, en appliquant des taux d’actualisation adaptés.
VI. INVITE le Secrétaire général à diffuser cette Recommandation ;
VII. INVITE les Adhérents à diffuser la présente Recommandation à tous les niveaux de gouvernement ;
VIII. INVITE les non-Adhérents à prendre en compte la présente Recommandation et à y adhérer ;
IX. CHARGE le Comité des assurances et des pensions privées de suivre la mise en œuvre de cette Recommandation et de faire rapport au Conseil dans les cinq années suivant son adoption, puis régulièrement par la suite.