LE CONSEIL,

VU l’article 5 b) de la Convention relative à l’Organisation de coopération et de développement économiques en date du 14 décembre 1960 ;

VU la Recommandation du Conseil concernant les Lignes directrices régissant la protection de la vie privée et les flux transfrontières de données de caractère personnel [C(80)58/FINAL], la Recommandation du Conseil relative aux Lignes directrices régissant la protection des consommateurs dans le contexte du commerce électronique [C(99)184/FINAL], la Recommandation du Conseil concernant les Lignes directrices régissant la sécurité des systèmes et réseaux d'information : vers une culture de la sécurité [C(2002)131/FINAL], la Déclaration de Séoul sur le futur de l'économie Internet [C(2008)99], et la Recommandation du Conseil sur les principes pour l’élaboration des politiques de l’Internet [C(2011)154] ;

RECONNAISSANT qu’un nombre croissant d’enfants passent de plus en plus de temps sur Internet, en commençant à un âge de plus en plus précoce, et que les technologies Internet et les appareils donnant accès aux réseaux évoluent rapidement, ce qui facilite l’accès des enfants à l’Internet et modifie les types d’utilisation qu’ils en font ;

RECONNAISSANT que si l’Internet a des retombées positives majeures pour les enfants en termes d’éducation, d’expression individuelle et de développement social, il s’accompagne également d’un éventail de risques vis-à-vis desquels les enfants sont plus vulnérables que les adultes ;

RECONNAISSANT l’importance de la coopération et de l’échange d’information entre l’ensemble des parties prenantes dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des stratégies de protection des enfants sur Internet ;

RECONNAISSANT que la protection des enfants sur Internet nécessite des politiques qui à la fois réduisent les menaces de manière à promouvoir un Internet plus sûr pour les enfants et permettent aux enfants de se protéger eux-mêmes des menaces qui subsistent ;

RECONNAISSANT que même si des différences culturelles régionales et locales influent sur l’évaluation des risques pour les enfants sur Internet, le dialogue et la coopération au plan international se sont révélés précieux pour établir des stratégies plus efficaces à l’égard d’un média qui est par définition de dimension  mondiale comme l’Internet :

Sur la proposition du Comité de la politique de l’information, de l’informatique et des communications :

I.            CONVIENT, aux fins de la présente Recommandation, que :

i)   Le terme « enfants » désigne tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, étant entendu que la limite d’âge peut être plus basse dans l’application de certaines protections juridiques ; le terme « parents » désigne les parents des enfants ainsi que les personnes qui en ont la garde ;

ii)  L’expression « protection des enfants sur Internet » vise l’ensemble des risques liés aux contenus, aux contacts pouvant être établis, au comportement des enfants en tant que consommateurs, ainsi qu’aux risques relatifs à la sécurité de l’information et à la vie privée auxquels les enfants sont exposés sur l’Internet ;

iii)  L’expression « parties prenantes » englobe les gouvernements, les entreprises, la société civile et la communauté de l’Internet ainsi que les autres entités contribuant au maintien de la sûreté de l’Internet et à l’éducation des enfants.

II.           CONVIENT que la présente Recommandation ne couvre pas les risques liés à la circulation d’images d’abus sexuels ou à l’exploitation sexuelle d’enfants sur Internet, qui sont des questions prises en compte par d’autres instruments internationaux ;

III.          RECOMMANDE que dans la formulation de politiques destinées à protéger les enfants sur Internet, les gouvernements et l’ensemble des autres parties prenantes prennent en considération les principes suivants :

a. Autonomisation

i)   Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient reconnaître que toutes les parties prenantes partagent la responsabilité à la fois de rendre Internet plus sûr pour les enfants en réduisant les menaces auxquelles ils peuvent y être exposés, et d’aider les parents dans leur rôle premier d’évaluer et de limiter le plus possible les risques de préjudice à leurs enfants dans le monde numérique aussi bien que dans le monde physique ;

ii)  Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient autonomiser les enfants et les parents pour leur permettre d’évaluer et de limiter les risques, et d’évoluer sur Internet dans des conditions de sûreté et de sécurité, et de façon responsable.

b. Proportionnalité et valeurs fondamentales

i)   Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient être proportionnées aux risques, efficaces et équilibrées. Elles devraient maximiser la protection contre les risques auxquels sont exposés les enfants en ligne sans restreindre les possibilités et retombées positives de l’Internet pour les enfants comme pour les autres utilisateurs.

ii)  Les politiques de protection des enfants sur Internet ne devraient pas porter atteinte à l’ensemble des conditions qui permettent à l’Internet  de fonctionner comme une plateforme ouverte mondiale au service de la communication, l’innovation, de la croissance économique et du progrès social. La compatibilité des politiques conçues pour protéger les enfants sur Internet avec les autres politiques économiques et sociales à l’égard de l’Internet devrait être soigneusement pesée avant leur adoption et leur mise en œuvre.

iii)  Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient être compatibles avec les valeurs fondamentales des sociétés démocratiques telles qu’elles s’appliquent à l’ensemble des individus y compris les enfants. Elles devraient notamment favoriser la liberté d’expression, la protection de la vie privée et la libre circulation de l’information.

c. Flexibilité

i)   Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient être adaptées à l’âge et tenir compte des différences de développement et des vulnérabilités particulières. Lorsque sont établies des restrictions fondées sur l’âge, toutes les parties prenantes devraient s’efforcer de les faire respecter.

ii)  Les politiques de protection des enfants sur Internet devraient être neutres sur le plan technologique de manière à garantir leur pérennité dans un environnement dynamique caractérisé par des technologies et des formes d’utilisation qui évoluent rapidement.

IV.          RECOMMANDE que, dans la formulation de politiques au plan intérieur pour la protection des enfants sur Internet, les gouvernements :

a.            Ouvrent la voie et s’engagent à protéger les enfants sur Internet en :

i)   Adoptant des objectifs clairs au plus haut niveau du gouvernement ;

ii)  Identifiant les organismes publics ayant la responsabilité et le pouvoir de mettre en œuvre ces objectifs et de coopérer au-delà des frontières ;

iii)  Élaborant des politiques pour protéger les enfants sur Internet qui associent l’ensemble des partie prenantes et s’appuient sur une combinaison de mesures publiques et privées, volontaires et juridiques, informatives, pédagogiques et techniques.

b.           Favorisent une réponse coordonnée de l’ensemble des parties prenantes en facilitant et, le cas échéant, en établissant :

i)   Un dialogue ouvert destiné à favoriser les synergies, tirer parti des compétences de toutes les parties prenantes, notamment des parents, des éducateurs et des enfants eux-mêmes, et à prendre en considération leurs points de vue ;

ii)  Des partenariats pour l’élaboration de programmes d’auto- et de co-régulation caractérisés par la transparence et la responsabilisation.

c.            Favorisent la compatibilité et la cohérence des initiatives de protection des enfants sur Internet parmi l’ensemble des parties prenantes publiques et privées. Les gouvernements pourraient notamment :

i)   Veiller à l’application des mesures de protection existantes ;

ii)  Expliciter les catégories de risques et harmoniser la terminologie utilisée pour informer le public ;

iii)  Promouvoir des mesures qui se renforcent mutuellement, au lieu d’accumuler des initiatives isolées ou indépendantes, qui risquent d’être incompatibles.

d.           Encouragent l’information et l’éducation, qui sont des outils essentiels pour autonomiser les parents et les enfants, par exemple, en :

i)   Intégrant dans les programmes scolaires l’acquisition d’une maîtrise de l’Internet et de son utilisation qui mette l’accent sur les risques et sur les comportements appropriés dans cet environnement;

ii)  Formant les éducateurs et en encourageant les autres parties prenantes à éduquer et à sensibiliser les enfants et les parents ;

iii)  Mesurant régulièrement l’évolution de leur maîtrise de l’Internet.

e.            Encouragent des politiques de protection des enfants sur Internet qui soient fondées sur des données probantes, en :

i)   Facilitant la poursuite du développement d’une solide base empirique et analytique, notamment à travers la réalisation d’études longitudinales, de manière à contribuer à l’élaboration et la mise en œuvre des politiques par une meilleure compréhension de l’usage de l’Internet par les enfants, de l’évolution des risques et de la sensibilisation ;

ii)  Procédant à des études régulières d’impacts des politiques, notamment des initiatives de co- et autorégulation.

f.            Encouragent le développement et l’adoption de technologies pour la protection des enfants sur Internet qui respectent les droits des enfants et la liberté des autres utilisateurs de l’Internet. Les gouvernements pourraient notamment :

i)   Promouvoir de nouvelles recherches sur des mesures techniques de protection de la vie privée qui soient interopérables et faciles d’emploi, notamment des systèmes de contrôle parental et de vérification de l’âge ;

ii)  Promouvoir l’utilisation de technologies qui permettent aux enfants de se protéger eux-mêmes contre les risques dans le monde numérique ;

iii)  Encourager l’évaluation de l’impact potentiel de ces mesures techniques vis-à-vis de valeurs fondamentales comme la liberté d’expression, la protection de la vie privée et la liberté de circulation de l’information, ainsi que la mise en place de mesures de sauvegarde appropriées ;

iv) Promouvoir des mécanismes de labellisation, qui attestent que ces mesures techniques sont dignes de confiance, de qualité et faciles d’emploi.

V.           RECOMMANDE qu’au niveau international, les gouvernements :

a.            Renforcent les réseaux internationaux d’organisations nationales chargées de la protection des enfants sur Internet, comme les réseaux d’assistance téléphonique et de centres d’information et, s’il y a lieu, facilitent un élargissement de leur rôle.

b.           Échangent des informations sur les stratégies nationales de protection des enfants sur Internet et notamment élaborent les fondements empiriques d’une analyse comparative internationale quantitative et qualitative. Les gouvernements pourraient notamment :

i)   Adopter un cadre statistique commun assurant la comparabilité internationale des indicateurs sur l’utilisation de l’Internet par les enfants, sur la prévalence des risques, sur la connaissance que les parents et les enfants ont de ces risques et des moyens d’y faire face, de même que sur l’impact et l’efficacité de l’action publique ;

ii)  Harmoniser la définition statistique des risques et des mesures prises par les pouvoirs publics pour y faire face, de même que des groupes d’âge d’enfants utilisés à des fins statistiques ;

iii)  S’engager conjointement à actualiser régulièrement les données quantitatives officielles selon un calendrier prenant en compte l’évolution dynamique de l’Internet et de son utilisation par les enfants.

c.            Soutiennent les initiatives régionales et internationales de renforcement des capacités afin d’améliorer les politiques publiques et les mesures pratiques destinés à protéger les enfants sur l’Internet, notamment la mise en commun et l’échange des outils d’éducation et de sensibilisation qui ont fait leurs preuves.

d.           Améliorent la coordination des travaux menés par les divers organes et organisations à l’échelon international et régional qui jouent un rôle à l’appui des efforts gouvernementaux dans ce domaine, notamment l’OCDE, l’Organisation de coopération économique Asie-Pacifique, le Conseil de l’Europe, l’Union européenne, le Forum sur la gouvernance de l’Internet, l’Union internationale des télécommunications, l’Organisation des États Américains, et associent des acteurs non gouvernementaux en tant que de besoin.

VI.          INVITE :

-    Les Membres et le Secrétaire général à diffuser la présente Recommandation à toutes les parties prenantes et aux autres organisations internationales ;

-    Les non-Membres à adhérer à la présente Recommandation et à collaborer avec les Membres à sa mise en œuvre.

VII.         CHARGE le Comité de la politique de l’information, de l’informatique et des communications de l’OCDE de réexaminer la présente Recommandation et sa mise en œuvre et de faire rapport au Conseil dans les cinq ans suivant son adoption, puis ultérieurement, en tant que de besoin.