LE CONSEIL,

VU l'article 5 b) de la Convention relative à l'Organisation de coopération et de développement économiques, en date du 14 décembre 1960 ;

VU les Recommandations du Conseil, en date du 14 novembre 1974, concernant les principes relatifs à la pollution transfrontière, en date du 11 mai 1976, sur l'égalité d'accès en matière de pollution transfrontière et, en date du 17 mai 1977, pour la mise en oeuvre d'un régime d'égalité d'accès et de non-discrimination en matière de pollution transfrontière [C(74)224, C(76)55(Final), C(77)28(Final)] ;

VU la Déclaration sur la politique de l'environnement adoptée par le Comité de l'environnement réuni au niveau des Ministres le 14 novembre 1974, d'après laquelle « les Gouvernements uniront leurs efforts en vue de résoudre les problèmes de pollution transfrontière dans un esprit de solidarité, avec l'intention de continuer à développer le droit international dans ce domaine » ;

PRENANT NOTE du Rapport du Secrétariat, en date du 14 novembre 1977, sur la protection de l'environnement dans les régions frontières ;

VU les activités du Conseil de l'Europe en matière de coopération transfrontière ;

CONSCIENT que de très nombreux problèmes de pollution transfrontière entre pays Membres se posent dans des régions frontières contiguës entre lesquelles existent des liens multiples de nature économique, sociale, culturelle et écologique ;

CONSIDÉRANT que ces problèmes peuvent être résolus de la manière la plus efficace par une coopération entre les diverses autorités compétentes des pays Membres concernés ;

Sur la proposition du Comité de l'environnement ;

RECOMMANDE que les pays Membres développent, conformément à leurs règles propres de répartition des compétences entre les institutions politiques et administratives, leur coopération en matière de protection de l'environnement des régions frontières en tenant compte, éventuellement sous réserve de réciprocité, des lignes directrices énoncées dans l'Annexe à la présente Recommandation qui en fait partie intégrante.


 

ANNEXE

 

LIGNES DIRECTRICES POUR LA COOPÉRATION INTERNATIONALE EN VUE DE LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DANS LES RÉGIONS FRONTIÈRES

I.          Introduction

1.         L'objet de ces lignes directrices est de promouvoir la coopération entre les pays Membres de l'OCDE en vue de faciliter, dans le cadre des politiques de l'environnement définies par ces pays au plan national ou international, la solution des problèmes internationaux de protection de l'environnement de caractère régional ou local qui se posent dans leurs régions frontières.

Ces lignes directrices ne portent pas atteinte à l'étendue ou à la nature des compétences des entités régionales ou locales telles qu'elles sont définies par le droit interne de chaque pays, aux règles de contrôle ou de tutelle auxquelles sont soumises ces entités ou aux compétences des organes centraux en matière de relations internationales et d'orientation politique générale. Elles doivent donc être interprétées ou, le cas échéant, mises en oeuvre dans le respect du principe de la souveraineté nationale et des règles constitutionnelles de chaque pays.

2.         Les lignes directrices ont notamment trait à la prévention et à la lutte contre les pollutions entre régions frontières contiguës, aux systèmes d'alerte et plans d'urgence en cas de pollution transfrontière et à l'utilisation des sols dans la mesure où cette utilisation joue un rôle dans les questions traitées (notamment l'implantation des activités polluantes ou des zones sensibles à la pollution). Elles concernent par exemple le traitement des eaux en vue de la fourniture d'eau, la gestion des nappes phréatiques dans les régions frontières, la collecte et l'épuration des eaux usées, ainsi que le ramassage et l'élimination des déchets et ordures.

3.         Aux fins de ces lignes directrices1, on entend par « pays », les pays Membres de l'OCDE qui participent à cette Recommandation ; par « région frontière », une région d'un pays située le long d'une frontière terrestre ou maritime de ce pays ; par « régions frontières contiguës », les régions frontières situées de part et d'autre d'une frontière terrestre ou maritime commune à deux pays ; par « entité régionale ou locale », toute autorité ou collectivité régionale ou locale et tout organisme exerçant des fonctions régionales ou locales selon le droit interne de chaque pays ; par « concertation organique », un système organisé d'informations mutuelles, de discussions et d'échanges de points de vue destiné à rechercher des solutions harmonisées à des problèmes d'intérêt commun qui n'a pas le caractère formel d'une négociation internationale dans le cadre de consultations interétatiques.

Il appartient aux autorités compétentes de déterminer, en fonction du problème examiné, la partie de son territoire considérée comme région frontière au sens de cette Recommandation et de décider quelles seront les entités régionales et locales concernées.

La réponse à la question de savoir si un bras de mer est suffisamment étroit pour qu'au sens de cette Recommandation, les côtes des deux pays concernés se faisant face constituent des « régions frontières contiguës », dépendra de la nature de la pollution transfrontière dont il s'agit et, le cas échéant, sera fournie par un accord entre les pays concernés.

II.         Lignes directrices relatives aux principes généraux de coopération

1.         Dans le but de protéger l'environnement des régions frontières contiguës, les pays devraient veiller à l'existence d'un niveau approprié de coopération, notamment au stade de la prévention des pollutions transfrontières, et veiller tout particulièrement à l'application des principes d'égalité d'accès et de non-discrimination tels que définis dans les Recommandations C(74)224, C(76)55(Final) et C(77)28(Final) à l'intérieur de ces régions.

Information du public

2.         Conformément au principe d'égalité d'accès [C(77)28(Final), Annexe, paragraphe 9], les pays devraient veiller à ce que les personnes exposées à un risque sensible de pollution transfrontière soient informées par les voies définies par eux et se voient offrir des possibilités analogues à celles qui sont données aux personnes du pays d'origine, pour prendre part, dans des conditions semblables, aux audiences et procédures de caractère administratif et judiciaire.

Études d'incidences sur l'environnement

3.         Conformément au principe de non-discrimination [C(77)28(Final), Annexe, paragraphes 1 et 3], quand, dans une région frontière, l'implantation d'activités est subordonnée dans un pays à la réalisation d'une étude d'incidences sur l'environnement, ce pays devrait veiller à ce que soient incluses dans cette étude, dans toute la mesure du possible et sur une base équivalente, les effets de ces activités des deux côtés de la frontière.

Dans ce but et conformément aux principes d'échange d'information et de consultation [C(77)28(Final), Annexe, Titre C], lorsque le lieu d'implantation de l'activité envisagée est situé dans une région frontière, les pays concernés devraient coopérer - et encourager leurs entités régionales et locales des deux côtés de la frontière à en faire de même - pour la collecte des informations nécessaires à l'établissement de l'étude d'incidences et, éventuellement, à assurer la fourniture ou la transmission de ces informations aux responsables des études d'incidences.

Le pays d'origine devrait communiquer au pays exposé les résultats et éléments pertinents pour la pollution transfrontière des études d'incidences sur l'environnement entreprises sur son territoire, lorsque ces études font apparaître un risque sensible de pollution transfrontière et que cette communication n'est pas interdite par les dispositions législatives et réglementaires ou les conventions internationales applicables.

Au cas où cette transmission serait interdite ou lorsque le pays d'origine considère qu'il n'est pas en mesure de transmettre certains éléments de ces études, eu égard à leur nature confidentielle, le pays d'origine devrait néanmoins coopérer avec le pays exposé afin de l'informer aussi complètement que possible ou de trouver une autre solution satisfaisante.

Échange d'informations scientifiques

4.         Conformément au principe de l'échange d'informations scientifiques [C(74)224, Annexe, paragraphe 11], les pays devraient faire un effort particulier pour rendre compatibles leurs méthodes de mesures de la pollution utilisées de part et d'autre de la frontière par leurs services techniques respectifs. Ils devraient agir de même pour rendre comparables les critères d'évaluation de la pollution et les données statistiques qui fondent les mesures de protection de l'environnement dans leurs régions frontières.

III.        Lignes directrices relatives à la coopération internationale mise en oeuvre au niveau régional ou local

5.         Les pays devraient encourager leurs entités régionales ou locales à coopérer avec les entités correspondantes du ou des pays voisins en vue de faciliter la mise en oeuvre, dans les régions frontières contiguës, de leurs politiques respectives de l'environnement, et de résoudre par là même des problèmes spécifiques de protection de l'environnement.

Une telle coopération, menée dans le respect de la répartition des compétences fixées par le droit interne de chaque pays, pourra revêtir la forme de contacts, de concertations organiques, d'actions coordonnées ou conjointes, et impliquer éventuellement la conclusion d'arrangements ou d'accords. Dans ce dernier cas, le droit interne déterminera les modalités d'habilitation éventuelle des entités régionales ou locales à conclure de tels arrangements ou accords.

6.         A cet effet, les pays concernés devraient rechercher les moyens de résoudre les difficultés d'ordre juridique, administratif ou financier qui sont de nature à entraver une telle coopération mise en oeuvre au niveau régional ou local et élaborer ensemble, si besoin est, les cadres bilatéraux ou multilatéraux nécessaires à la mise en oeuvre d'actions communes particulières en matière d'environnement dans les régions frontières contiguës.

7.         Les pays devraient veiller à ce que la coopération entre entités régionales et/ou locales de part et d'autre d'une frontière au titre des lignes directrices n° 5 et 6, se développe aussi favorablement que la coopération entre entités régionales et/ou locales d'un même pays.

Coordination des administrations et rapports entre elles

8.         Afin d'améliorer les conditions nécessaires à la coopération pour la protection de l'environnement des régions frontières contiguës, les pays devraient, dans le cadre de leurs propres systèmes administratifs et juridiques et, le cas échéant, en application d'accords intergouvernementaux :

a)     veiller à la coordination de leurs différents services administratifs associés à la protection de l'environnement de leurs régions frontières ;

b)    désigner ou habiliter de façon expresse des agents d'administration centrale, régionale ou locale pour prendre tous contacts nécessaires avec leurs homologues de l'autre côté de la frontière et pour faciliter l'information réciproque, la concertation et le cas échéant, la consultation intergouvernementale, en vue de protéger l'environnement des régions frontières contiguës ;

c)     dresser un tableau des correspondances de compétences entre entités régionales ou locales des régions frontières contiguës appelées à collaborer à la protection de l'environnement et le leur diffuser.

Mise en oeuvre de la coopération internationale

a)         Concertation organique internationale

9.         Pour promouvoir la coopération dans le domaine de la protection de l'environnement des régions frontières contiguës, les pays devraient, de commun accord et dans la mesure où cela s'avérerait utile, instituer, si elle n'existe déjà, une concertation organique, réunissant diverses autorités administratives concernées et des représentants des entités régionales et/ou locales des régions frontières contiguës qui auront été désignées à cet effet dans chaque pays selon ses procédures propres.

10.        Lorsqu'une telle concertation n'est pas considérée par les pays concernés comme devant s'engager au niveau intergouvernemental, l'initiative et le fonctionnement pourraient en être laissés, dans des conditions à préciser par les pays, aux entités régionales ou locales directement concernées conformément à leurs droits internes.

11.        Les pays concernés devraient veiller à ce que les autorités administratives participant à cette concertation organique s'informent et se consultent régulièrement et en temps utile sur toute question de protection de l'environnement qui se poserait dans les régions frontières concernées et serait susceptible de créer des difficultés entre ces régions.

b)         Actions concrètes

12.        En vue de rendre plus aisée et plus efficace la coopération entre entités régionales ou locales visées à la ligne directrice n° 5, les pays devraient examiner l'utilité de prendre, dans le contexte particulier de leurs régions frontières et après les consultations intergouvernementales éventuellement jugées nécessaires par eux, des mesures qui viseraient à :

a)     favoriser la mise en oeuvre d'actions concrètes de protection de l'environnement envisagées par les entités régionales ou locales en coopération avec leurs homologues de l'autre côté de la frontière dans la mesure où ces actions sont compatibles avec leurs propres politiques de l'environnement au niveau national ;

b)    encourager et faciliter la préparation, par les entités régionales ou locales des régions frontières contiguës, de projets d'arrangements ou d'accords relatifs à des actions communes spécifiques de protection de l'environnement de ces régions, et éventuellement, autoriser la conclusion de tels arrangements ou accords au niveau administratif qu'ils jugeraient approprié ;

c)     prévoir, et mettre en place en cas de besoin, des systèmes permettant le financement conjoint d'études et d'actions communes de protection de l'environnement entreprises par les instances compétentes de pays voisins dans des régions frontières contiguës ;

d)    faciliter par tous moyens appropriés la tenue de réunions communes entre entités régionales ou locales de régions frontières contiguës.

c)         Questions financières

13.        Lorsque les instances supérieures d'un pays soutiennent financièrement les entités régionales ou locales de ce pays dans leurs actions de protection de l'environnement, elles devraient ne pas faire de distinction dans l'octroi de ce soutien, que ces actions contribuent à la protection de l'environnement de ce pays même ou d'une région frontière d'un pays exposé, sous la réserve que les conditions et les zones d'application soient, elles-mêmes, comparables.

14.        Lorsque des entités régionales ou locales de régions frontières contiguës engagent, avec l'assentiment ou l'autorisation des instances compétentes des pays concernés, des actions communes pour la protection de l'environnement, elles devraient pouvoir bénéficier de facilités financières équivalentes à celles qu'elles pourraient obtenir pour une action analogue engagée à l'intérieur de leur territoire national avec une autre entité régionale ou locale dans des conditions et zones comparables.

 



1    Les définitions de « pays d'origine », « pays exposé », « pays concerné », « pollution » et « pollution transfrontière » sont celles incluses dans la Recommandation du Conseil en date du 17 mai 1977 [C(77)28(Final)].