LE CONSEIL,

Vu l'article 5 b) de la Convention relative à l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques, en date du 14 décembre 1960 ;

Vu la Recommandation du Conseil, en date du 23 octobre 1986, concernant les mesures requises pour faciliter l'évaluation environnementale des projets et programmes d'aide au développement [C(86)26(Final)] ;

ConsidÉrant l'accord qui s'est fait au Conseil de l'OCDE, réuni au niveau ministériel les 18 et 19 mai 1988, sur la nécessité pour l'Organisation de poursuivre ses efforts visant l'élaboration d'approches communes en vue de l'examen, sous l'angle de l'environnement, des projets d'aide bilatéraux et multilatéraux, en tant que contribution supplémentaire à un développement durable [C(88)107] ;

Conscient de la nécessité, pour les pays Membres, de tenir compte des impacts que peuvent avoir leurs activités sur l'environnement et de s'employer à resserrer la coopération avec les pays en développement ;

Notant que le CAD a mis au point des « Principes pour l'examen préalable des projets » contenant des dispositions visant expressément la protection de l'environnement [DAC(88)3(Final)] ;

Sur la proposition du Comité de l'environnement et du Comité d'aide au développement ;

I.          RECOMMANDE aux gouvernements des pays Membres :

a)     de veiller à ce que, dans le domaine de l'aide au développement bilatérale et multilatérale, les aspects environnementaux soient pris en compte dans l'identification, la planification, la mise en oeuvre et l'évaluation des projets de développement proposés pour financement ;

b)    de mettre la « liste de points à vérifier relatifs à l'environnement à l'usage éventuel des responsables de haut niveau » (jointe en annexe I) à la disposition :

1.    de leurs hauts fonctionnaires responsables de l'approbation des projets bilatéraux d'aide au développement, et

2.    de leurs représentants aux Conseils des institutions multilatérales d'aide au développement ;

c)     d'encourager les responsables visés aux points b) 1 et 2 ci-dessus à appliquer cette liste de points à vérifier avant d'approuver ou de rejeter les projets d'aide au développement proposés ; et

d)    d'encourager les responsables susmentionnés à prêter attention aux effets environnementaux des décisions concernant l'octroi d'une aide-programme ainsi que des décisions relatives aux projets.

II.         INVITE les pays Membres à échanger des informations sur l'expérience acquise dans l'utilisation de la « liste de points à vérifier relatifs à l'environnement » pour les projets bilatéraux et multilatéraux d'aide au développement.

III.        INVITE le Comité d'aide au développement, en coopération avec le Comité de l'environnement :

a)     à suivre la prise en compte de la « liste des points à vérifier relatifs à l'environnement » dans la prise des décisions en matière d'aide au développement tant bilatérale que multilatérale ;

b)    à présenter, dans un délai de trois ans, un rapport sur l'efficacité avec laquelle les pays Membres de l'OCDE ont intégré les analyses et évaluations environnementales améliorées à la mise au point des projets multilatéraux et bilatéraux et aux prises des décisions, y compris l'application volontaire de la « liste de points à vérifier » et d'autres méthodologies connexes.

IV.        CHARGE le Secrétaire général de transmettre la présente Recommandation aux institutions multilatérales d'aide au développement et à d'autres organisations internationales compétentes, en vue de favoriser un meilleur examen des aspects environnementaux des projets d'aide au développement par tous les donneurs.


 

ANNEXE I

 

LISTE DE POINTS À VÉRIFIER RELATIFS À L'ENVIRONNEMENT À L'USAGE ÉVENTUEL DES RESPONSABLES DE HAUT NIVEAU

I.          Identification des effets

1.       Le projet a-t-il une incidence sur telle ou telle zone écologiquement sensible ?*

2.       Existe-t-il un relevé précis des effets importants, favorables et défavorables, du projet sur l'environnement ? Les risques ont-ils été évalués ?*

3.       A-t-on porté attention aux effets externes (dits effets en amont et en aval), notamment aux effets transfrontières, ainsi qu'au délai susceptible de s'écouler avant que ces effets ne se fassent sentir ?*

II.         Mesures d'atténuation

4.       Quelles sont les mesures d'atténuation proposées et quels sont les différents sites qui ont été envisagés ?*

5.       Quels enseignements tirés de projets analogues antérieurs ont été intégrés à l'évaluation environnementale du présent projet ?

6.       Les populations et les groupes intéressés ont-ils été associés aux préparatifs du projet et leurs intérêts ont-ils été correctement pris en compte ? Des déplacements de population sont-ils prévus ? Des mesures de compensation suffisantes sont-elles envisagées ?*

III.        Procédures

7.       Comment les lignes directrices relatives à l'environnement utilisées par l'organisme d'aide et le gouvernement du pays bénéficiaire ont-elles été prises en considération ?

8.       A quels stades du processus de décision l'évaluation environnementale est-elle intervenue ?*

9.       Comment les effets favorables et défavorables du projet sur l'environnement ont-ils été intégrés à l'analyse économique du projet ?

10.     Les autorités chargées de la protection de l'environnement dans le pays en développement ont-elles été consultées lors de l'établissement du projet ? Les autorités centrales du pays en développement qui sont chargées d'approuver le projet ont-elles connaissance des conséquences de ce projet pour l'environnement et ont-elles approuvé les mesures prévues de protection de l'environnement ?*

IV.        Mise en œuvre

11.     Est-il nécessaire, pour rendre efficaces les mesures de protection de l'environnement, de renforcer les institutions du pays en développement ? Dans l'affirmative, quelle action envisage-t-on ?*

12.     Comment et par qui les effets sur l'environnement et les mesures d'atténuation de ces effets seront-ils surveillés pendant et après la mise en œuvre du projet ?

13.     Le coût des mesures requises de protection de l'environnement a-t-il été évalué et possède-t-on des garanties suffisantes et réalistes quant au financement de ces mesures ?


 

ANNEXE II

 

EXPLICATIONS RELATIVES À CERTAINES QUESTIONS DE LA LISTE DE POINTS À VÉRIFIER

Question 1 : les zones écologiquement sensibles sont, par exemple :

a)     les sols fragiles et les zones de conservation des sols ;

b)    les zones sujettes à la désertification ; les zones arides et semi-arides ;

c)     les forêts tropicales et le couvert végétal ;

d)    les sources d'eau ;

e)     les habitats qui présentent un intérêt particulier pour la protection et la conservation ou l'exploitation durable des ressources en poissons ainsi que de la faune et de la flore sauvages, notamment les zones humides, les mangroves et les récifs coralliens ;

f)     les sites qui présentent un intérêt unique (du point de vue historique, archéologique, culturel, esthétique, scientifique) ;

g)    les zones de concentration soit de population, soit d'activités industrielles, dans lesquelles la poursuite du développement industriel ou de l'expansion urbaine risque de créer des problèmes importants du point de vue de l'environnement (en particulier de la qualité de l'air et de l'eau) ;

h)     les zones présentant un intérêt particulier du point de vue social pour des groupes spécifiques de population vulnérable (par exemple, les populations nomades et celles ayant un style de vie traditionnel).

Question 2 : les types de projets pour lesquels il convient de fournir un relevé précis des effets sur l'environnement sont les suivants :

a)     modifications importantes des modalités d'exploitation des ressources renouvelables (par exemple, conversion de terres en terres agricoles ou sylvicoles, en pâturages, développement rural, production de bois d'oeuvre) ;

b)    modifications importantes des pratiques utilisées dans le domaine de l'agriculture et de la pêche (par exemple, introduction de cultures nouvelles, mécanisation à grande échelle) ; utilisation de produits chimiques en agriculture (par exemple, pesticides, engrais) ;

c)     exploitation de ressources hydrauliques (par exemple, barrages, projets d'irrigation et de drainage, gestion de l'eau et aménagement de bassins hydrauliques, approvisionnement en eau) ;

d)    ouvrages d'infrastructure (par exemple, routes, ponts, aéroports, ports, lignes de transport d'électricité, pipelines, réseaux de chemin de fer) ;

e)     activités industrielles (par exemple, usines métallurgiques, usines de traitement du bois, usines chimiques, centrales électriques, cimenteries, raffineries et installations pétrochimiques, industries agro-alimentaires) ;

f)     industries extractives (par exemple, mines, carrières, installations d'extraction de tourbe, de pétrole ou de gaz) ;

g)    gestion et élimination des déchets (par exemple, réseaux d'assainissement et stations d'épuration, décharges de déchets, usines de traitement des ordures ménagères et des déchets dangereux).

Les types particuliers d'effets favorables et défavorables sur l'environnement peuvent varier d'un projet à l'autre. Ainsi, un projet d'irrigation - voir c) ci-dessus - peut avoir pour effet favorable de créer de nouveaux lieux de pêche en eau douce. Par ailleurs, il peut avoir pour effet défavorable sur l'environnement d'aggraver la salinisation, l'érosion des sols, etc.

Question 3 : parmi les effets externes figurent, par exemple, les dommages à la faune et à la flore aquatiques en aval d'un site industriel, lorsque les effluents ne sont pas traités avant d'être rejetés dans un cours d'eau ou une autre masse d'eau.

Il est important que les décisions prennent en compte les conséquences différées des projets, comme le montre l'exemple de routes qui sont construites dans des zones naturelles jusque-là intouchées et qui engendrent souvent des activités agricoles extensives (culture itinérante) et une détérioration de l'environnement.

Question 4 : les mesures d'atténuation sont des mesures prises pour réduire ou limiter les effets dommageables pour l'environnement. Il s'agit notamment :

a)     de traiter les effluents industriels avant qu'ils soient rejetés dans des masses d'eau ;

b)    de construire des barrières antibruit pour des projets routiers et industriels ;

c)     de créer des réserves naturelles et autres zones protégées afin de compenser la conversion de terres à des fins de développement.

Question 6 : les populations touchées devraient contribuer à la définition et à la compréhension des problèmes que posent la planification et la mise en oeuvre des solutions liées aux projets de développement. Pour cela, il faut accorder une large place aux considérations d'équité dans le développement et décentraliser les processus de décision. Parallèlement, il conviendrait de déployer des efforts visant à assurer un développement durable et la pleine participation des populations rurales.

Question 8 : l'évaluation environnementale d'un projet ou programme devrait commencer au stade de l'étude de préfaisabilité ou de la proposition de projet et être intégrée aux analyses coûts-avantages et aux études de faisabilité technique.

Question 10 : un des moyens d'assurer la diffusion des informations sur les effets environnementaux du projet consiste à engager un processus de consultation entre les différents ministères et organismes du pays en développement avant de prendre une décision finale sur le projet.

Question 11 : parmi les mesures pouvant être prises pour renforcer les institutions publiques des pays en développement figurent l'organisation de cours de formation à l'évaluation et à la gestion de l'environnement et le détachement de conseillers spécialisés chargés d'aider les fonctionnaires à évaluer les effets sur l'environnement qui pourraient découler de projets, programmes ou politiques, ainsi que d'informer les responsables et le public des solutions de rechange acceptables qui atténueraient les effets dommageables pour l'environnement et renforceraient la qualité du cadre de vie dans la région touchée. Les organisations privées et non gouvernementales pourraient bénéficier d'un appui pour entreprendre des activités tendant à sensibiliser davantage les populations locales aux problèmes d'environnement.

 



*     Voir l'annexe II (tirée en partie des Recommandations adoptées par le Conseil de l'OCDE en 1985 et en 1986 à propos de l'évaluation environnementale et de l'aide au développement C(85)105 et C(86)26(Final).