LE CONSEIL,

VU l'article 5 b) de la Convention relative à l'Organisation de coopération et de développement économiques en date du 14 décembre 1960 ;

CONSIDÉRANT que, à l'occasion de la réunion de l'OCDE au niveau ministériel les 15 et 16 mai 2002, les ministres ont mandaté l'OCDE pour qu'elle développe « des analyses et des recommandations politiques concernant la définition et la couverture du risque terroriste ainsi que l'évaluation des rôles respectifs du secteur des assurances, des marchés de capitaux et des pouvoirs publics, notamment pour la couverture du risque d'hyper-terrorisme » [voir Conseil de l'OCDE au niveau des ministres, 15-16 mai 2002 : Communiqué final PAC/COM/NEWS(2002)58] ;

CONSIDÉRANT que cette Recommandation ne vise pas à fournir une définition générale des actes terroristes, mais une tentative de définition du concept de terrorisme dans la perspective de son indemnisation ;

CONSIDÉRANT que cette Recommandation ne vise pas à énoncer une définition internationale unique et exhaustive, mais à élaborer une liste des principaux éléments de définition que les pays de l'OCDE et les pays non-membres pourraient considérer ; prenant note du fait que cette liste est par conséquent indicative, et peut être adaptée par les différentes parties concernées pour refléter les spécificités des conditions de leur marché, de leur cadre réglementaire ou de leurs objectifs politiques ; reconnaissant que certains pays pourront également souhaiter prendre d'autres critères en considération, afin de faciliter la distinction entre le terrorisme et d'autres types d'infractions ;

CONSIDÉRANT que ces critères de définition ne revêtent pas un caractère obligatoire et que la prise en compte de ces éléments peut être utile pour les pouvoirs publics qui mettent en place un dispositif d'indemnisation des dommages consécutifs à des actes terroristes et pour les entités du secteur privé des assurances ;

CONSIDÉRANT qu'il revient à chaque pays/entité de définir plus précisément certain critères, le cas échéant quantitativement ou qualitativement, en fonction de considérations techniques ou politiques spécifiques ;

Sur proposition du Comité des assurances :

RECOMMANDE que les pays Membres et les entités du secteur privé impliquées dans l'indemnisation des dommages liés au terrorisme prennent en compte la liste des critères de définition présentée en appendice de ce document dont il forme partie intégrante, lorsqu'ils définissent le terrorisme dans une perspective d'indemnisation.

INVITE les non-membres à prendre dûment en considération les termes de cette Recommandation.


 

APPENDICE

 

LISTE DE CRITÈRES POUR DÉFINIR LE TERRORISME DANS UNE PERSPECTIVE D'INDEMNISATION

La liste ci-après a pour objet d'aider les entités du secteur privé et les pouvoirs publics concernés par l'indemnisation des dommages terroristes à définir ce que sont les actes de terrorisme, ainsi que les critères de détermination des actes terroristes indemnisables, que ce soit par l'intermédiaire de mécanismes assurantiels privés ou d'autres mécanismes d'indemnisation. Cette liste est fournie à titre indicatif et ne revêt un caractère ni obligatoire, ni exhaustif ; elle peut être adaptée par les différentes parties concernées à des conditions de marché, un cadre réglementaire ou des objectifs d'action publique spécifiques.

Les critères suivants peuvent être considérés pour définir les actes de terrorisme dans une perspective d'indemnisation :

A)         Éléments de définition d'un acte terroriste, qui peuvent inclure[a]:

Critère 1 – Moyens et effets

Un acte terroriste est :

·         un acte, pouvant inclure mais non limité à l'usage de la force ou de la violence, portant gravement[b] atteinte à la vie humaine ou à des biens matériels ou immatériels ; ou

·         une menace d'acte de cette nature susceptible de donner lieu à de gravesb dommages.

Critère 2 – Intention

Un acte terroriste est commis ou menace d'être commis :

·         avec l'intention d'influencer ou de déstabiliser un gouvernement ou un organe public et/ou de susciter la crainte et l'insécurité dans tout ou partie de la population;

·         à l'appui d'un objectif politique, religieux, ethnique, idéologique ou d'ordre similaire.

B)         Critères d'assurabilité, qui peuvent inclure:

Critère 3 – Assurabilité technique[c], fondée en principe sur :

·         la capacité d'évaluation des dommages (la probabilité et la gravité de ces derniers devraient être quantifiables) ;

·         le caractère aléatoire (le moment de la survenance de l'événement assuré devrait être imprévisible au moment de la souscription de la police, et la survenance elle-même devrait être indépendante de la volonté de l'assuré) ;

·         la mutualisation du risque (de nombreuses personnes exposées à un aléa donné devraient pouvoir être regroupés pour former une communauté du risque au sein de laquelle ce dernier serait partagé et diversifié).

Critère 4 – Assurabilité économiquec, qui pourrait dépendre des éléments suivants :

·         l'ampleur des dommages potentiels : elle ne devrait en principe pas dépasser la capacité du marché assurantiel/réassurantiel privé ni, le cas échéant, celle d'un ensemble de mécanismes privés et publics prévoyant différents niveaux d'intervention. L'assurabilité du risque sera évaluée à l'aune du cumul total des fonds mis à disposition par les différents intervenants potentiels (assureurs, réassureurs et, potentiellement, mécanismes de pool permettant la mutualisation nationale ou internationale des risques, et pouvoirs publics) en fonction de leurs capacités respectives. Il importe dès lors de définir ex ante la segmentation quantitative des risques, c'est-à-dire les planchers et les seuils d'intervention (la nature, et le montant des seuils et la base servant à les calculer) ;

·         nature des dommages potentiels : pour être assurables, les dommages potentiels devraient correspondre aux catégories de dommages garanties par les mécanismes assurantiels disponibles. La liste des catégories à couvrir devra être définie à l'aide d'une segmentation qualitative des risques opérée ex-ante ;

·         tarification : pour que le risque soit assurable, il devrait être possible de fixer une prime d'assurance adéquate et équitable d'un point de vue actuariel.

Critère 5 – Assurabilité légale/réglementaire

Les autorités de réglementation peuvent décider qu'un risque donné, ou un type donné de risque (par exemple les accidents du travail ou les pertes d'exploitation) est explicitement ou implicitement défini comme assurable, par exemple par le biais d'une procédure de certification et/ou la transformation de la couverture de ce risque en assurance obligatoire. Dans ce cas, un risque peut être classé comme assurable alors que d'autres critères d'assurabilité ne sont peut-être pas remplis.

C)         Conditions nécessaires à l'indemnisation (hors assurance), qui peuvent inclure :

Critère 6 – Conditions d'indemnisation par l'Etat

Les Etats doivent statuer sur les possibilités d'indemnisation en fonction des orientations de leur action. Le risque ne doit pas dépasser l'engagement financier maximal que l'Etat est capable ou désireux de souscrire pour l'indemnisation des dommages provoqués par le terrorisme.

Critère 7 – Conditions d'indemnisation par le biais de mécanismes non gouvernementaux

Les caractéristiques techniques du risque doivent permettre sa garantie par le biais de mécanismes financiers autres que l'assurance, comme par exemple par des obligations placées sur les marchés de capitaux.



[a]                  Certains pays pourront souhaiter prendre d'autres critères en considération. Le critère d'affiliation à un groupe ou à une organisation a par exemple été employé avec succès dans plusieurs pays Membres pour définir les actes de terrorisme. De façon similaire certains pays pourront souhaiter ne pas se référer à l'un ou l'autre des éléments mentionnés pour leur propre définition des actes de terrorisme. Par exemple, le concept de « menace » d'acte de terrorisme n'est pas considéré dans certains pays comme un élément pertinent de définition du terrorisme.

[b]                  Il revient à chaque pays/entité de définir ces critères plus précisément, peut-être quantitativement ou qualitativement le cas échéant, en fonction de leurs considérations politiques ou techniques spécifiques. Il faut toutefois souligner qu'un pays de l'OCDE au moins a adopté une définition du terrorisme basée exclusivement sur des critères qualitatifs.

[c]                  Il convient de rappeler que, sauf si l'assurance contre le risque terroriste a été rendue obligatoire, la détermination de l'assurabilité d'un risque par des entités privées dépend en dernier ressort de l'analyse et de l'appréciation de la ou des compagnies d'assurance ou de réassurance concernée(s). Un assureur/réassureur peut décider, notamment pour des raisons commerciales ou stratégiques, de garantir un risque qui remplit peut-être difficilement les critères théoriques de l'assurabilité. Il peut aussi décider de ne pas garantir un risque afin, à un moment donné, de prendre en compte par exemple des préoccupations concernant la solvabilité ou l'équilibre de son portefeuille de risques.